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Les différentes formes de ballets et de danses
Valérie Folliot

la carole (durant tout le Moyen Age et au-delà ; la carole est un mot générique qui veut dire "la danse" ; d’origine gréco-latine, le mot carole renvoie à toute danse formant une ronde ; or, selon Germaine Prudhommeau, après l’an mille, il s’applique plus spécifiquement aux danses nobles, par opposition aux danses paysannes que désigne espringuier, terme d’origine germanique ; parmi les formes de danse en cercle, on compte notamment le branle dont la ligne de base est un rond formé de couples ; selon le nom de la danse, Branle des Sabots où l’on tape des pieds, Branle des Lavandières où l’on frappe dans ses mains pour imiter le battoir, Branle des Hermites où l’on croise ses bras en s’inclinant comme les jeunes novices, Branle de l’Official où les cavaliers font sauter leur partenaire, Branle de la Torche où le danseur tenant la torche choisit une cavalière, danse avec elle, lui laisse la torche, et la danseuse fait de même après avoir choisi un cavalier, selon sa spécificité, le branle s’agrémente de multiples nuances aux mimiques éloquentes, ce qui rapproche le branle des balli, danses mimétiques à caractère narratif ; le principe commun de tous ces branles est le pas de côté en va et vient ; autre variante très représentative des plaisirs seigneuriaux, ces danses donnent à la Cour une occasion de se divertir tout en rivalisant de beauté et d’adresse ; également basée sur la cellule du couple, la danse du Branles courans est attestée en 1550 par Gervaise et se fonde sur l’aller-retour en procession ; ce branle perpétue à la Renaissance une tradition médiévale transformée ; la Courante est mentionnée en 1515 par Marot ; ainsi que tout autre jeu dansé, elle commence par la révérence, c’est-à-dire par un pas en arrière que l’on fait en nombre impair : (1) trois couples se forment puis (2), successivement, ils vont se placer au bout de la salle ; alors(3), les messieurs quittent leurs dames et (4) vont se placer à l’opposé de la salle en vis à vis de leur femme respective, puis (5) à tour de rôle, ils leur reviennent (6) en exécutant des mimiques plaisantes tout en exécutant les pas en vigueur dans les basses danses (pas simple, pas double, branle ou transfert du poids, démarche, pas de brabant ou pas sauté ou encore saltarello, relevé sur demi-pointes — pour la Courante, les danseurs déambulent en zigzaguant et en sautillant car leur marche consiste en pas simple, deux pas enchaînés, suivi du pas double, trois pas enchaînés, à gauche puis à droite, le tout étant ponctué par le saltarello — la Courante est une succession de deux pas simples / un pas double, alternativement de chaque côté, enchaînement de pas entrecoupé de petits sauts) ; les cavaliers paradent ainsi, et quand ils arrivent à la hauteur des cavalières (7), celles-ci leur tournent le dos ; (8) ils repartent donc en mimant leur peine ou bien leur courroux ; enfin (9), toujours l’un après l’autre et de la même façon, les trois danseurs s’en reviennent vers leur promise ; mais quand ils arrivent face à elles (10), ils s’agenouillent toutefois en joignant les mains, (11) ce qui les fait agréer ; après cela (12), les trois couples dansent ensemble) ; en forme de chaîne ouverte, selon Manfred Bukofzer (1960, 835), la carole se chante et se joue en plein air ; un groupe de danseurs se tenant par la main se déplace avec douceur sur un mouvement circulaire ou latéral quand le groupe choral (lui-même) entonne le refrain (responsorium ou ripresa) entre les couplets chantés par le chante-avant, (le coryphée) ; " Pendant les couplets du chef, le mouvement s’interrompait, chacun restant à sa place et marquant la mesure par des mouvements rythmiques des bras. La corrélation entre le mouvement de la danse et le refrain d’une part, et entre l’intervention du soliste et l’interruption du mouvement de l’autre, a survécu jusqu’à nos jours dans certaines danses populaires. On trouve cela aussi dans la ballata italienne du xiiie siècle ; d’ailleurs le terme technique de stance dérive probablement du latin stare. La monodie musicale du refrain était compensée par l’activité de la danse. Ainsi les éléments des formes musicales et chorégraphiques étaient-ils intimement liés. C’était une forme d’une ingénieuse simplicité ; le chœur ne devait rien savoir de plus que le refrain, tandis que le chef ajoutait (ou improvisait) de plus en plus de vers, ou additamenta, alors que la danse se poursuivait. " La carole repose sur une structure alternative, combinant des parties de solo et des parties de chœur. Les danseurs exécutent eux-mêmes la musique ou bien ils se font accompagner par l’appoint instrumental des jongleurs (amuseurs publics et musiciens ambulants) et ménestrels (musiciens attachés à la cour d’un seigneur). Bien souvent, les jongleurs et les ménestrels sont des interprètes de vielle ; ils sont appelés "joueurs" parce qu’ils exécutent les partitions des "trouveurs", c’est-à-dire des trouvères et troubadours, trop satisfaits d’eux-mêmes pour daigner jouer. Comme les "joueurs" faisaient alterner le chant et l’instrument pour rythmer la danse chorale, les danseurs adoptaient donc ce mouvement musical.

la tresche (XIIe-XVe)

la farandole (XVe et au-delà)

le trope (Xe-XIIIe)

la mascarade (XIIIe-XVe et au-delà ; tout d’abord, la mascarade est liée à l’essor des villes survenu au xiiie siècle ; elle est organisée entre Noël et l’Epiphanie durant la fête des Fous, ou fête de l’Âne, et se déroule dans l’église elle-même puis dans les rues ; les rôles sont inversés et un bouffon déguisé en prélat défile sur un âne à travers la cité ; la liesse générale déborde les autorités si bien que la population en arrive à profaner l’autel par exemple, employé en guise de table des réjouissances ; la mascarade se joue également durant le premier jour de carême, c’est-à-dire le Mardi Gras lorsqu’il est encore permis de manger de la viande avant les quarante jours de menus "maigres" ; durant le carnaval, le cortège du Bœuf Gras s’organise afin de rendre hommage aux divinités ancestrales symbolisant la fertilité et la fécondité ; au xve siècle en Italie, la mascarade désigne un défilé dansé lors du carnaval ; une "masquerie" permet aux nobles qui se cachent le visage au moyen d’un "loup", et s’enveloppent dans une cape dissimulatrice appelée "domino" de se joindre au peuple tout en préservant leur anonymat, et par conséquent, leur réputation ; enfin, au xvie siècle, la mascarade désigne un ballet travesti)

le mystère (fin XIVe-XVI; vers la fin du xive siècle, selon Pierre Sonrel, les acteurs des mystères se constituent en confréries ; fondés en 1403, les Confrères de la Passion louent une salle dans la rue Saint-Denis à Paris ; c’est le premier théâtre fixe et couvert qui s’ouvre à la capitale ; au début du xvie siècle, les mystères ont perdu leur caractère sacré ; ils sont devenus des farces grotesques très aimées du public de foire ; c’est pourquoi le Parlement de Paris en 1548 les interdit et tout ce qui se réclame du spectacle religieux ; néanmoins un Privilège est concédé aux Confrères de la Passion installé à l’Hôtel de Bourgogne ; eux seuls peuvent donner des représentations théâtrales à Paris ; malgré cette interdiction et ce privilège, les acteurs continuent de jouer la comédie dans les collèges, dans quelques salles et chez les particuliers, partout en France, surtout en province)

la danse macabre (XIVe-XVI; exécutée par des acteurs professionnels, elle est représentée soit dans les églises, soit chez les particuliers ; Paul Bourcier (1995, 94) indique que le Clergé s’opposait aux danses macabres jouées dans les cimetières car il redoutait le fanatisme et la dérive païenne ; un document comptable de Lille fait référence au paiement à Nicaise de Cambrai pour avoir produit, lisons-nous, "avec ses autres compagnons certain jeu, histoire et moralité sur le fait de la danse macabre" devant le duc de Bourgogne à Bruges en 1498 ; il est probable qu’une troupe itinérante s’était spécialisée dans la représentation allégorique et satirique de la Mort)

la momerie (XIVe-XV; en 1440, Charles d’Orléans l’emploie pour qualifier un travestissement durant une fête, car le sens premier de momer, momon (1263) est "se déguiser", "mascarade" ; le terme "momerie" s’apparente à l’espagnol momo (grimace) et à l’allemand Mumme (masque) ; son radical mom le rapproche du mot môme indiquant la petitesse ; parmi les cérémonies de Cour, quoi que la royauté soit un spectacle et que la vie privée du prince ne se distingue pas de ses devoirs publiques, la momerie figure au rang des réjouissances officieuses, aux côtés des bals, des chasses à courre et des banquets ; les autres fêtes sont en revanche liées aux réceptions officielles, aux visites, aux alliances, aux naissances et aux deuils royaux (entrées, sacres, obsèques) ; la momerie est un impromptu, une "masquerie" ; ainsi celle de janvier 1393 appelée Le Bal des Ardents ; Colette Beaune raconte que durant le bal organisé pour le remariage d’une des dames de la reine Isabeau de Bavière, les momons s’embrasèrent : " C’est l’hiver et la reine a invité toute la Cour. Les musiciens jouent quand brusquement, six sauvages, vêtus de costumes couverts d’étoupe et le visage masqué, font irruption au milieu des danseurs. Ils hurlent et dansent de manière volontairement ridicule. Les costumes prennent brutalement feu aux torches de l’escorte du duc d’Orléans qui venait d’entrer dans la salle. Il y eut quatre morts et le roi ne fut sauvé que par la présence d’esprit de la jeune duchesse de Berry qui l’enveloppa de sa robe. L’histoire fit scandale. Le roi, dont la santé mentale était déjà ébranlée, n’avait pas besoin d’un choc supplémentaire. Orléans, frère du roi, pouvait passer pour responsable et il n’était guère populaire. Mais surtout, ce qui gênait les clercs et le peuple, c’est que le roi avait failli mourir dans le péché et le sacrilège. En effet, nos jeunes sauvages faisaient un charivari, un tapage bruyant qu’on pratiquait lors des remariages mal assortis. L’Eglise l’interdisait comme une injure au sacrement de mariage. Se déguiser en loup, faire de l’homme, créature de Dieu, une bête, était péché, transgression de l’ordre divin. L’inconscience royale avait bien failli être punie et la colère de Dieu se serait abattue sur le royaume. Il y avait donc des distractions de cour qui n’étaient guère conseillées au roi, car on les estimait incompatibles avec la dignité de la fonction royale qui imposait plus de réserve et de retenue. Le roi aurait dû, pensait-on, se contenter du rôle de spectateur. C’était le cas aussi pour les tournois. Le Très Chrétien ne se fourvoyait pas dans ces combats fictifs que l’Eglise condamnait. On y mourait en effet dans la colère et inutilement. Si mourir à la croisade vous assurait le Paradis, mourir dans un tournoi vous menait en enfer. L’Eglise vous refusait toute cérémonie mortuaire et l’accès à la terre bénite du cimetière. Durant tout le Moyen Age, les rois de France se contentèrent donc du rôle de spectateur dans les nombreuses fêtes chevaleresques. " (1997, 116-118) Avec la guerre de Cent Ans, la chevalerie est remplacée par l’infanterie et l’artillerie ; chassés des champs de bataille, les chevaliers perdent leur prestige, leurs usages n’ayant plus cours ; aussi les Grands d’Anjou et de Bourgogne perpétuent-ils la tradition chevaleresque en organisant, au xve siècle, des tournois, des fêtes princières où se réfugient la noblesse d’armes délaissée. Un tournoi, à la fin du Moyen Age, est un sport en soi ; le tournoi de cour est ordonné selon un cérémonial et un système compliqué d’attribution des points désignant le vainqueur ; on n’y risque plus guère sa vie, comme on la risquait dans les tournois des xiie et xiiie siècles ; en l’occurrence, les épées étaient rabattues, les lances fragiles et minces, l’armure pratiquement impénétrable. A la fin, les participants et les spectateurs prennent part à un banquet fastueux, agrémenté de danse, de divertissements et de multiples exhibitions. Mais, au xve siècle, les mœurs changent : un nouveau protocole oblige donc les Grands à se raffiner en adoptant les manières courtoises inspirées des modes italiennes, fondées sur la bienséance et un certain hiératisme oriental. C’est pourquoi les joutes meurtrières et les momeries endiablées sont alors interdites puisque jugées à la fois dangereuses et grossières ; et le port du masque devient nécessaire parce que le seigneur s’y dissimule sans craindre déroger.

l’entremets (dernier tiers du XIVe- fin XV; étant donné que les moyens de communication sont difficiles au Moyen Age, les visites officielles sont rares ; aussi quand elles surviennent, les préparatifs sont-ils déployés dans un faste extrême ; tout concourt à faire de la visite du souverain un événement exceptionnel ; lorsqu’en 1378 l’empereur d’Allemagne Charles iv rentre à Paris, son neveu le roi de France, Charles v, lui envoie une escorte et fait décorer toutes les villes ; Colette Beaune explique comment se déroula le festin : " Le dîner le plus solennel fut donné le jour de l’Epiphanie en plusieurs tables, l’Empereur, son fils et le roi symbolisant les rois mages sous un dais à la table de marbre, puis le dauphin et les ducs sous un autre dais. On servit trente mets entrecoupés quand même de deux entremets dont le dernier eut le plus grand succès. Godefroy de Bouillon s’y emparait d’une Jérusalem de bois ardemment défendue par des Sarrasins bien noirs. C’était montrer que le but ultime de la réconciliation entre l’Empire et le royaume restait l’organisation d’une croisade commune en Terre Sainte. Dans la pratique, elle n’eut pas lieu, mais il sortit quand même de cette visite un rapprochement réel entre les deux pays et le règlement des conflits portant sur la frontière de l’Est. Importance réelle donc de ce voyage, importance symbolique aussi. " (1997, 121) L’entrée royale suivie d’un festin magnifié par l’entremets manifestent le pouvoir. Le monarque, parce qu’il a été sacré, est reconnu comme l’élu de Dieu aux yeux de tout son royaume. Quand il visite ses cités et qu’il y fait glorieusement son entrée, il dialogue avec son peuple. L’entrée comme l’entremets célèbrent sa grandeur. Elle l’édifie. Durant le repas, en ce jour des Rois, on représenta la première croisade, celle de Godefroy de Bouillon ; il était couronné alors qu’il n’avait pas encore été sacré roi de Jérusalem ; l’action se déroule devant les convives ; les pavillons révèlent l’origine des différents croisés (outre Godefroy, on reconnaît les comtes d’Auvergne et les ducs de Normandie par les blasons) ; les entremets étaient des spectacles prévus pour égayer des banquets officiels fort longs ; ce jeu était destiné à distraire et à appeler à la croisade comme le Banquet du vœu en 1454. Cet entremets, également appelé la Fête du faisan, est composé de quatre parties. Le musicologue David Fallows (1991) en décrit les éléments principaux : " Avec son pâté en croûte contenant vingt-huit ménestrels, son éléphant, ses jeux, ses joutes, ses bals et ses représentations théâtrales au sens symbolique complexe, Le Banquet du vœu est devenu proverbial de l’extravagance des cours à la fin du Moyen Age. L’hôte en était Philippe le Bon de Bourgogne, alors au sommet de sa puissance et régnant sur une cour admirée à travers l’Europe pour sa magnificence et sa générosité, et le lieu son Hôtel de la Salle à Lille. Constantinople tomba aux mains des Turcs en mai 1453. En novembre, le pape envoya un émissaire à Philippe le Bon pour lui demander de mener une nouvelle croisade — geste qui confirmait publiquement sa position de grand-duc d’Occident. Trois mois plus tard, le dimanche 17 février 1454, la réponse de Philippe prit la forme de ce grand festin dont la culmination fut l’arrivée d’un faisan vivant devant lequel Philippe et une foule de gentilshommes prêtèrent serment de vaincre le Grand Turc. " C’est Olivier de la Marche qui organise le déroulement du banquet-spectacle ; il joue aussi le rôle de la Sainte Eglise, monté sur le dos d’un éléphant conduit par un géant. La dépense et la précipitation de cette fête furent excessives. " Dans la salle du banquet étaient dressées trois immenses tables. Charles, comte de Charolais, âgé de vingt ans, présidait la plus grande. (…) Sur cette table étaient disposés un grand nombre d’ornements dont le fameux pâté en croûte, qui ajoutait extravagance et excentricité à la coutume du pâté en croute laissant échapper, une fois ouvert, des oiseaux vivants. Le Duc lui-même présidait une table plus petite réunissant des invités de marque, sur laquelle s’élevait une église à échelle réduite contenant des cloches, un orgue et quatre chantres. Les principaux divertissements musicaux se tinrent dans le pâté et dans l’église miniature, à côté d’intermèdes exécutés dans la salle et de fréquentes fanfares annonçant les différentes parties du festin. Bien d’autres tableaux alternèrent avec la musique : géants, chevaux, grotesques, etc., ainsi qu’une série de mimes évoquant l’histoire de Jason — figure centrale de la mythologie entourant l’ordre de chevalerie de la Toison d’or de Philippe le Bon. Tous ces spectacles amenèrent l’arrivée de la "Sainte Eglise", qui, en un long discours, supplia Philippe de la sauver. Après les vœux de Philippe et de ses courtisans, les tables disparurent "comme par enchantement" et les adresses de dames de la cour symbolisant les Vertus prirent place, suivies d’un bal, de joutes et de bien d’autres réjouissances jusqu’à trois heures du matin. (…) La musique à la cour de Philippe était réputée dans toute l’Europe et servait de modèle à beaucoup d’autres foyers aspirant à l’excellence. " Par ailleurs lors de son mariage avec Isabelle de Portugal, Philippe le Bon était apparu en véritable dynaste, considéré comme un prince favorisé par le destin. Mais l’ambition de Philippe le Bon, "grand duc du Ponant", inquiétait tous les souverains d’Europe, dont Louis xi. Pour rivaliser avec la superbe de la Toison d’or, l’ordre chrétien le plus convoité d’Occident (1430), pour s’opposer à Philippe le Bon, duc de Bourgogne, le roi de France crée son propre ordre chevaleresque, c’est l’ordre de Saint-Michel, fondé le 1er août 1469 à Amboise, avec l’archange comme emblème parce qu’il faisait alors l’objet d’un culte extraordinaire. Toutefois, la Maison ducale de Bourgogne demeure la plus brillante au xve siècle ; elle initie la culture flamboyante et préfigure la Renaissance : festins, bals, tournois, cérémonies se succédaient dans un luxe féerique dont la richesse était rehaussée par l’éclat des lettres et des arts. Aussi le plus ancien ouvrage connu, en français, concernant la technique de la danse médiévale et son système de notation (la tablature) est le Manuscrit des Basses Danses de la Bibliothèque de Bourgogne ; ce recueil a probablement été conçu pour Marie de Bourgogne. L’entremets relève du faste des cours royales et ducales en rivalité à la fin du Moyen Age. Il disparaît quand la monarchie se sédentarise et qu’elle centralise ses courtisans.

 

 

 

L’Office de l’Etoile ; l’Office de la Nativité ; l’Office de l’Annonciation ; l’Office de la Passion…

" C’est alors que vous auriez pu voir la carole tourner et les gens danser joliment et faire mainte belle figure et maint beau tour sur l’herbe fraîche. " (Lors veïssiez querole aller/Et genz mignotement bauler/Et faire mainte bele treche/Et maint bio tor sor l’erbe fresche.) vers742 à 745 ; " Déduit faisait danser avec beaucoup de noblesse, au milieu de la carole, deux demoiselles fort mignonnes, qui étaient simplement en cottes et dont les cheveux n’avaient qu’une tresse, mais il n’est pas utile de parler de la grâce avec laquelle elles dansaient. L’une venait bien gentiment à la rencontre de l’autre ; et quand tous trois étaient bien rapprochés, ils avançaient brusquement la bouche l’un vers l’autre, si bien que vous auriez eu l’impression qu’ils se donnaient des baisers au visage. Ils savaient bien onduler leur corps. " (Bien se savoient debrisier.) vers 758 à 770 ; Le Roman de la Rose, Guillaume de Lorris et Jean de Meun (fin XIIIe ; une des œuvres littéraires les plus lues au Moyen Age et même au-delà : Ronsard en fait encore l’éloge et les lecteurs médiévaux l’utilisent comme recueil de sentences sur l’amour courtois).

La fête de l’Âne ou fête des Fous.

Le Mystère de la Passion ; le Mystère de l’Ascension ; le Mystère des rois mages ; le Mystère de l’Incarnation et de la Nativité (à Rouen en 1474)

Danse macabre à l’église de Caudebec (1393) ; représentation d’une danse macabre jouée dans l’hôtel de Philippe, duc de Bourgogne à Bruges (1498) ; fresque de la Chaise-Dieu (XVe) ; sculpture sur l’église Saint Maclou de Rouen (1528)…

Le Bal des Ardents (le 29 janvier 1393 à Paris) ; le mime de aventures de Jason (1454)

L’entremets de La Prise de Jérusalem comporte deux chars : Jérusalem & une galère (1377) ; le Banquet du Vœu ou Fête du Faisan présente un char figurant l’Eglise sous les traits d’une Dame assise sur un éléphant conduit par un géant et de nombreux éléments décoratifs dont une machinerie très élaborée permettant de faire descendre un dragon du plafond puis de le faire voler autour de la salle avant qu’il ne disparaisse ; en outre, le mime des aventures de Jason est représenté sur une estrade équipée d’un rideau, le plus ancien emploi connu (1454) ; l’entremets des ambassadeurs hongrois dispose d’un char en forme de rocher (1457) ; l’entremets du mariage du duc de Bourgogne et de Marguerite d’York dispose d’un char en forme de baleine (1468) ; l’entremets du mariage du duc de Milan et d’Isabelle d’Aragon donne la représentation des aventures de Jason et la Toison d’or (1489)…

Tableau chronologique

Genre

avant le Xe

XIe

XIIe

XIIIe

XIVe

XVe

XVIe

Carole

             

Tresche

             

Farandole

             

Trope

             

Mascarade

             

Mystère

             

danse macabre

             

Momerie

             

Entremets

             

 

 

 

genre

avant le Xe

XIe

XIIe

XIIIe

XIVe

XVe

XVIe

la carole

célébration rituelle et syncrétique au solstice (Noël) et au printemps (Pâques) ; procession en corolla (petite couronne), chantée sur le kyrie eleison les clericuli exécutant le tripudium sur des textes pieux durant Noël, Pâques, la Pentecôte, la Toussaint et les fêtes des saints, dansent des "caroles latines" dites "cléricales" du latin chorea, (danse), chorus (chœur), choraules (joueur de flûte), du grec aulos (flûte), c’est une danse sacrée, religieuse ou profane la "carole" désigne aussi le bas-côté de l’église où les religieux dansaient le "rondeau" et la "virelai" appelé ballata en Italie collective et chantée, c’est la danse du peuple ; instrumentale, par couple ou en trio (ballade, estampie, ductia, branle), c’est la danse des nobles bassa danza quaternia piva alta danza sont des pas ; le ballo est dansé en pantomime ; le branle (rond formé de couples) stylise des actions ; Branle de la Torches… à la Renaissance, la danse de bal, dite la "carole", est remplacée par une danse à la fois curiale et théâtrale ; la danse pure et de pantomime figure dans les spectacles appelés "ballet de cour"

tresche

             

farandole

             

trope

 

Office de l’Etoile

de la Passion

       

Mascarade

     

-entre Noël et l’Epiphanie, fête des Fous, fête de l’Âne, dans l’église et la rue

Mardi Gras durant le carnaval dans le cortège du Bœuf Gras

 

en Italie, la mascarade désigne un défilé dansé lors du carnaval, c’est une "masquerie" réunissant roturiers et nobles

désigne un ballet travesti

Mystère

         

les Confrères de la Passion à Paris (1402)

Mystère de l’Incarnation et de la Nativité à Rouen (1474)

le Parlement de Paris les interdit hormis ceux des Confrères à l’Hôtel de Bourgogne (1548)

Danse macabre

        dans l’église de Caudebec, donnée par des acteurs qui à chaque tour, sortaient un à un (1393) la Chaise-Dieu

(fresques)

dans l’église de Besançon (1453)

dans l’hôtel de Philippe, duc de Bourgogne à Bruges (1498)

sculptée sur les chapiteaux de l’Aître saint Maclou à Rouen (1528)

Momerie

        Bal des Ardents (1393)

mime de Jason (1454)

 

Entremets

       

la Prise de Jérusalem (1377)

le Banquet du vœu (1454)

 

ballet de cour (dernier tiers du XVIe- fin XVII; il connaît son apogée entre 1581 et 1653, puis, passé 1664, il décline dès lors que Louis xiv se sera assuré de son pouvoir absolu ; en 1661, il réglemente l’art de la danse et crée l’Académie Royale de Danse en direction des Maîtres à danser ; cette même année, Molière conçoit un genre théâtral nouveau, la comédie-ballet qui enchante le roi, d’où le désintérêt du Roi Soleil vis à vis du ballet à entrées)

comédie-ballet (milieu du XVIIe- fin XVIII; spectacle de professionnels auquel les nobles participent parfois, mis au point par Molière pour la dramaturgie et la mise en scène, Beauchamp pour la chorégraphie, et par Lulli pour la musique, la comédie-ballet est une pièce de théâtre comportant des scènes jouées par des acteurs, des intermèdes chantés, dansés et de la pantomime dans le goût italien ; une intrigue conduit l’action ; aussi les passages joués, chantés et dansés, s’enchaînent-ils avec vraisemblance ; Molière espérait que les actes et les entrées fussent "cousues", c’est-à-dire qu’elles se justifient mutuellement ; après 1673, le texte parlé sera abandonné au profit du texte chanté)

tragi-comédie-ballet (milieu du XVIIe- fin XVIII; à la fois sérieuse et comique, c’est une pièce dont l’action se situe dans l’Antiquité grecque et dont les dieux et les humains constituent les personnages de l’histoire ; le texte s’articule mieux à la danse si bien que les entrées de ballet bénéficie d’une meilleure intégration au cours de la pièce)

pastorale (milieu du XVIIe- fin XVIIIe)

tragédie-ballet (dernier tiers du XVIIe- fin XVIII; genre principal à l’Opéra, la tragédie-ballet articule les passages lyriques aux passages chorégraphiés ; c’est le spectacle noble par excellence puisque Louis xiv se passionnait pour la danse et que la tragédie domine toute autre forme au théâtre ; Lulli pour la musique, Quinault pour le texte, Beauchamp et Pécour pour la danse, la tragédie-ballet est le genre principal à l’Académie Royale de Musique créée en 1669, puis confiée à la direction de Lulli en 1672)

opéra-ballet (fin du règne de Louis xiv, 1695, début XVIIIe à la Révolution ; l’opéra-ballet hérite du découpage à entrées des ballets de cour ainsi que de la dramaturgie théâtrale des tragédies-ballets ; comme dans les ballets de cour, la mythologie reste la source d’inspiration classique ; comme au théâtre, chaque acte représente une saynète, car chaque entrée est cohérente ; souvent, le chant introduit la danse qui illustre l’histoire en une sorte de bouquet final ; c’est un genre théâtral professionnel dont le siège reste l’Académie Royale de Musique ; les danses ne constituent pas que des divertissements interrompant le développement dramatique car, au contraire, celles-ci cherchent à renforcer les moments culminant de l’action ; c’est pourquoi les divertissements dansés des opéras-ballets sont de véritables allégories ; Rameau négligera les livrets médiocres pour mettre en valeur la virtuosité des choeurs et des danseurs)

symphonie de danse (début XVIII; due au musicien Jean-Ferry Rebel, c’est un genre instrumental descriptif spécifique au spectacle de danse ; elle développe des petites comédies chorégraphiques souvent interprétées par deux à six solistes ; elle utilise le langage ornemental de la danse pure et puise dans les danses de bal sans recourir à la pantomime)

fragment ou acte de ballet (XVIII; genre de petite dimension conçu à des fins commerciales ; les fragments apportaient de précieuses ressources à l’Administration de l’Opéra embarrassée par les lourdes dépenses des spectacles à machines ; à partir de 1777, les fragments sont florissantes ; Le devin de village, opéra italianisant de Rousseau, se combine sous forme d’intermède à d’autres extraits marquants : ainsi, le 10 avril 1777, on représente au programme La Danse (acte des Fêtes d’Hébé (1739) de Rameau), Les Ruses de l’Amour, Le devin de village qui, plus tard, sera donné en alternance soit avec La chercheuse d’esprit (ballet sans paroles de Maximilien Gardel créé le 1er mars 1778, dont le sujet avait été préalablement porté au théâtre par Favart) soit avec Annette et Lubin (ballet sans paroles ou paysannerie de Noverre inspiré d’une comédie de Favart, créé le 9 juillet 1778) ; les fragments d’œuvres de Rameau, Rousseau, Gardel, Noverre faisaient effectivement recette.

ballet-pantomime (première moitié du XVIIIe et au-delà ; depuis les basses danses et le ballet de cour, la danse n’avait rien à exprimer puisque des paroles dites et chantées l’accompagnaient ; mais sous la poussée des Lumières, s’installe l’idée que la danse puisse signifier ; le ballet-pantomime se rattache aux spectacles de la Foire ainsi qu’à une tradition ancienne, issue, d’une part, des mimes gréco-romains de l’Antiquité, et, d’autre part, des troupes de saltimbanques jouant la Commedia dell’Arte ; émules de Beauchamp et de Molière, Claude Balon et Françoise Prévost, John Weaver, Marie Sallé, François de Hesse, Franz Hilverding notamment, ouvrent la voie aux chorégraphes qui, comme Noverre, Gardel, Dauberval, Didelot ou Angiolini et Vigano, affranchiront la danse de la parole et donneront son autonomie expressive au geste)

ballet sans paroles ou ballet d’action (milieu XVIIIe et au-delà de la Révolution ; genre dominant à partir de 1780, le ballet d’action fait disparaître les formes de spectacles dansés avec paroles ; aussi restera-t-il le seul modèle de la scène chorégraphique au xixe siècle)

 

 

Tableau chronologique

Genre

XIIIe siècle

XVIIIe siècle

Ballet de cour

La Délivrance de Renaud
(Louis XIII en démon du feu et en Godefroy ; 1617)

Ballet de la Merlaison
(un tiers de danseurs professionnels ; 1635)

La Prospérité des Armes de France
(spectacle à "machines" ; 1641)

Ballet Royal de la Nuit
(Louis XIV en Roi Soleil ; 1653)

Le Palais d’Alcine
(joué par des danseurs professionnels et par une danseuse, Marquise du Parc ; 1664)

Le Divertissement royal
(ultime ballet où Louis XIV danse ; 1670)

Le Triomphe de l’Amour
(dernier du genre ; 21 janv. 1681)

 

Comédie-ballet

Les Fâcheux (1661)

Le Mariage forcé (1664)

L’Amour médecin (1665)

George Dandin (1668)

Monsieur de Pourceaugnac (1669)

Le Bourgeois gentilhomme (1670)

Le Malade imaginaire
(comédie mêlée de musique et de danse)
(1673)

 

Tragi-comédie-ballet

   

Pastorale

   

Tragédie-ballet

   

Opéra-ballet

   

Symphonie de danse

   

Fragment ou acte de ballet

   

Ballet-pantomime

   

Ballet sans paroles ou ballet d’action

   

Valérie Folliot

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